De l’allongement de l’espérance de vie découle un recul progressif de l’âge auquel on hérite. Arrêtons nous quelques instants sur cette notion d’allongement de l’espérance de vie et héritage.
Quelle est l’espérance de vie en France ?
D’après l’INSEE, les français nés en 2019 peuvent espérer vivre 79,7 ans, 85,6 ans pour les femmes.
Pour plus de détails, consultez cette étude de l’INSEE
Qu’est ce que l’espérance de vie ?
La réponse simple est de dire qu’il s’agit de la durée moyenne de la vie humaine calculée à un âge donné et dans une société donnée.
Une réponse plus complète d’après le centre d’observation de la société est de rappeler qu’il s’agit d’un calcul théorique. Ce calcul nous donne la durée de vie théorique d’un individu si les conditions de mortalité de l’année en cours restent constantes. Or elles fluctuent, de nouvelles découvertes médicales viennent l’allonger, davantage d’accidents la réduire.
Mais il convient surtout de garder à l’esprit que suivant le sexe, le niveau de vie et d’autres critères, l’espérance de vie à un âge donné n’est pas la même. Entre un homme et une femme, l’écart est de l’ordre de six ans. Mais entre deux hommes, suivant leur niveau de diplôme, une autre étude de l’INSEE nous indique qu’on peut mesurer également des écarts importants.
Des écarts importants d’espérance de vie
« Ainsi, entre les diplômés du supérieur et les non-diplômés, l’écart d’espérance de vie à 35 ans est de 7,5 ans pour les hommes et de 4 ans pour les femmes »
Selon l’INSEE, les hommes cadres vivent toujours 6 ans de plus que les hommes ouvriers
Une illustration choc de ces différences a été faite par Emmanuel Vigneron. Ce professeur, spécialiste de l’aménagement du territoire, a mesuré l’espérance de vie dans les différentes communes que parcourt la ligne B du RER.
Longue de 70 km seulement, cette ligne passe aussi bien par des cités populaires que dans des communes huppées. L’auteur résume les écarts mesurés en indiquant «en moins d’un quart d’heure de trajet, le risque de mourir une année donnée augmente de 82% entre les arrondissements les plus aisés de Paris et le quartier du Stade de France! »
Les inégalités de santé dans les territoires français, état des lieux et voies de progrès » par Emmanuel Vigneron, Editions Elsevier Masson) cité dans l’article de l’Express « La vie et la mort, le long du RER B » de Vincent Olivier publié le 12/05/2011
L’alimentation, l’accès aux soins et le niveau de vie expliquent d’après l’auteur ces différences.
Une forte augmentation de l’espérance de vie
L’espérance de vie tend à croître année après année. Et cette augmentation est rapide. On cite souvent le chiffre d’un trimestre par an de gagné sur longue période.
Une étude très complète a été faite par deux démographes : Jacques Vallin et France Meslé. Ces deux auteurs ont publié leur étude dans le bulletin mensuel d’information de l’Institut national d’études démographiques. Il est accessible en ligne.
Leur étude confirme effectivement que 25% d’augmentation est un rythme que l’on observe sur longue période. Mais ils démontrent que ce rythme moyen a fortement varié au cours des années. En remontant avant 1790, ils observent que l’espérance de vie reste stable avec peu de progression. Les auteurs estiment qu’en 1750 les hommes devaient avoir une espérance de vie de 27 ans et les femmes de 28 ans. Par rapport à 2019, l’espérance de vie a donc triplé ! L’ensemble des français vit donc globalement trois fois plus longtemps.
Différencier les différents gains d’espérance de vie
Cette même étude montre que les grandes découvertes faites en médecine ont permis à l’espérance de vie de croître à un rythme élevé. La vaccine de Jenner permet de lutter contre la variole, les travaux de Pasteur de généraliser les vaccins, et depuis 1960 les progrès réalisés sur les maladies cardiovasculaires permettent de mieux traiter ces pathologies.
Certains progrès permettent à tous de gagner de l’espérance de vie. D’autres permettent de réduire la mortalité infantile. En 1900, 15% des enfants mourraient avant d’avoir un an, en 1950 la mortalité infantile était de l’ordre de 5%, et ce taux est tombé à 0.35% de nos jours d’après l’Ined.
On peut avec un tel progrès comprendre que cela entraîne des gains importants pour l’espérance de vie. Mais pour une personne née en 1939, que ce taux baisse entre 1950 et 2019 ne lui apporte aucune amélioration. Globalement le chiffre de l’espérance de vie augmente mais cette augmentation ne bénéficie qu’aux plus jeunes.
A l’inverse cette personne née en 1939 sera favorablement impactée par les progrès récents qui portent sur les maladies qui touchent les plus de 70 ans (cancers, maladies respiratoires d’après le centre d’observation de la société) comme l’indique cette étude.
Un recul de l’âge du décès.
Ce qui ressort de cette évolution, c’est que l’âge du décès a eu tendance ces dernières années à reculer. Les gains d’espérance de vie se font car on soigne mieux les personnes âgées, qui meurent donc plus tard.
En conséquence l’âge auquel on touche son héritage recule
Une illustration de cette tendance est reprise par l’économiste et prix Nobel Thomas Piketty dans Le capital au 21ème siècle.
Le graphique indique sur longue période à la fois l’âge moyen des décédants et l’âge moyen des héritiers en ligne directe. On observe bien la tendance décrite plus haut : l’augmentation de l’âge auquel on touche son héritage est plus rapide lors des dernières années.
On hérite à présent à 50 ans
Comme l’indique le Journal La Croix, l’âge moyen de l’héritage est à présent de 50 ans
Alors qu’il était d’environ 40 ans en 1960 comme l’indique le graphique de Piketty. Et suivant les projections disponibles on pourrait hériter vers 58 ans en moyenne à horizon 2050. Cette augmentation est considérable avec dix ans de plus. Et l’on peut rapprocher ces chiffres de notre analyse de l’espérance de vie en fonction du diplôme ou du niveau de vie. Avec un écart de six ou sept ans suivant le diplôme ou le niveau de vie, cela implique que les héritages importants se font encore plus tardivement.
Des conséquences importantes sur la société.
Ce recul de l’âge de l’héritage a un impact sur la manière dont le capital circule entre générations. Cette analyse fera l’objet d’une autre publication
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