Droit à l’oubli, une notion assez abstraite et dépourvue de définition officielle. Mais qu’est-ce que le droit à l’oubli numérique ? Existe t-il une conception générale, Européenne du droit à l’oubli ? Qu’en est-il du droit à l’oubli d’une personne décédée, quelles outils sont disponibles pour le proche du décédé pour faire valoir ses droits ? Éléments de réponse.
Droit à l’oubli : définition
Aujourd’hui il n’existe pas de définition officielle de ce qu’est exactement le droit à l’oubli. La notion peut recouvrir différentes réalités concourant toutes à un même objectif : celui pour un individu de pouvoir décider qu’une information relative à son passé sorte de la sphère publique.
Droit à l’oubli : réception populaire
Aujourd’hui, quand on parle classiquement du droit à l’oubli, en réalité on évoque davantage le droit à l’oubli numérique c’est à dire le fait « d’écarter tout risque qu’une personne soit durablement atteinte par l’utilisation, à son insu, de données la concernant, qu’elles figurent sur la toile à son initiative ou à celle d’un tiers. »*
Céline CASTETS-RENARD suggère que « les personnes dont les données font l’objet d’un traitement disposent d’un droit à l’oubli selon lequel la conservation des données ne doit pas excéder la durée nécessaire aux finalités poursuivies » C. Castets-Renard, Droit de l’internet, droit français et européen, Montchrestien lextenson éd., 2012.
Droit à l’oubli numérique
Le droit à l’oubli numérique n’est pas véritablement le droit à l’oubli ou de la préservation et du respect de la mémoire. C’est la question de la publicité de l’information et ainsi que de son affichage. Une question fondamentale à l’heure ou les possibilités de stockage sont infinies et ou l’image d’une personne est essentiellement définie par quelques algorithmes qui sélectionnent l’information à mettre en avant.
L’avènement des moteurs de recherche pose aujourd’hui la question suivante : une personne physique doit elle être poursuivie à vie par des éléments de son passé, stockés et ensuite sélectionnés par une machine ?
Le droit à l’oubli en tant que notion juridique n’existe pas encore. Le 13 mai 2014, la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) rendait un arrêt important, considérant l’existence dans le droit européen d’une forme de « droit à l’oubli » sur les moteurs de recherche.
Les moteurs de recherche responsables ?
Le juge européen, dans cette affaire, estime que les moteurs de recherche sont responsables juridiquement des données à caractère personnel qu’ils affichent sur leur plateforme. En d’autres termes, ils doivent se plier aux exigences du droit européen en la matière, et rendre des comptes aux individus.
Depuis cette décision, une personne physique peut adresser directement au moteur de recherche une demande de désindexation sur le fondement du droit européen encadrant la protection des données à caractère personnel. En pratique, la décision de désindexer ou non un contenu sera prise en fonction d’un équilibre : celui du respect de cette législation d’une part (données obsolètes, ou non-pertinentes au regard du traitement) et de la protection du droit à l’information du public d’autre part.
La conséquence est une forme de droit à l’oubli. Mais la notion n’est pas évoquée par le juge dans cette décision. Par commodité, et pour d’avantage de compréhension.
A chaque pays sa conception du droit à l’oubli ?
Sur ce point, l’arrêt rendu par la CJUE le 13 mai 2014, qui consacre le déréférencement, est resté muet. Dans ses conclusions, l’avocat général avait néanmoins estimé que le déréférencement ne devait pas s’appliquer au .com. « La CJUE n’a pas la compétence pour faire appliquer ses décisions en dehors du territoire européen dès lors qu’elle se fonde sur une directive qui est d’applicable (d’application ?) territoriale, autrement dit qui s’applique uniquement aux responsables de traitements établis au sein du territoire européen » (Céline Castets-Renard).
Par conséquent, il n’est pas question pour Google de faire une application extraterritoriale du droit européen. Chaque pays a sa propre conception du droit à l’oubli et de son périmètre. Et la conception européenne, fondée sur la balance des intérêts entre la vie privée des personnes et le droit à l’information, s’arrête aux frontières de l’Europe. En outre, Google l’affirme tout net : il n’appartient pas à une autorité nationale de lui dicter sa conduite. Selon cette dernière : il n’appartient pas à une autorité nationale de lui dicter sa conduite. « Nous respectons la position de la Commission National de l’Informatique et des Libertés, mais nous contestons par principe l’idée qu’une agence nationale de protection des données personnelles revendique une autorité à l’échelle mondiale pour contrôler les informations auxquelles ont accès les internautes à travers le monde » ;
Droit à l’oubli d’une personne décédé ?
A l’heure actuelle, de nombreux sites ont mis à disposition un formulaire permettant aux héritiers de signaler un décès. Par exemple :
Facebook.com, propose de transformer le profil en compte de commémoration sécurisé et d’en assurer à cette même occasion la sécurité. De surcroît, les membres de la famille proche du défunt peuvent demander la suppression du compte après avoir justifié de leur lien de situation immédiat. Si la requête est acceptée, le journal concerné et tout le contenu associé sera supprimé et les données du défunt ne pourront être consultés.
Plus d’info ! Légataire Facebook : comment ça marche
Twitter.com traite la demande de suppression du compte d’un utilisateur décédé qui est formulée par une personne habilitée à agir dans le cadre de la succession ou par un membre de la famille. Il statue au cas par cas en fonction de facteurs d’intérêt public, tel que l’intérêt médiatique du contenu.
Par ailleurs, suite à la mort de l’acteur Robin Williams, le 14 aout 2014, Twitter a décidé en outre de modifier son règlement intérieur. Il est désormais possible de demander le retrait des images et des vidéos d’une personne décédée.
Microsoft.com à quant à lui créé la procédure « Parents proches ». La demande doit être accompagnée d’un dossier complet pour transmettre des vérifications sur l’état du compte et le lien de parenté du réquérant. Si elle est acceptée, un DVD contenant l’intégralité des données du compte du défunt et des instructions détaillées est expédiée au demandeur. Le mot de passe ne peut par ailleurs être délivré, ni être modifié.
Google.com quant à lui, offre la possibilité de fixer un délai à l’expiration duquel le compte doit être considéré comme inactif faute de connexion. La fin du délai est rappelé au titulaire du compte par texto ou par e-mail. Celui-ci peut également lister une dizaine de personnes de confiance qui seront alors alertées de ce terme avec la faculté de partager les données avec elles.
Malgré ces quelques avancées, la question de l’avenir de nos données personnelles reste une problématique majeure, puisque les informations divulguées sur internet survivent éternellement
C’est la raison pour laquelle il convient d’être prudent quant aux données que l’on publie sur le web. Néanmoins, est-il possible de prévoir leur suppression dans un testament ?
Quand est-il du testament ?
Le testament est un document par lequel une personne dispose de la manière dont sera attribué son patrimoine à son décès. Bien entendu, on pense immédiatement aux biens matériels (meubles, immeubles) mais quid des biens immatériels ?
Le patrimoine d’une personne ne se limite pas aux biens qui ont une existence physique. Il comprend également les biens tangibles tels que les données informatiques. Ces dernières sont soumises à un régime spécifique de survie qui exclut leur transmission à cause de mort / en cas de décès. Les prérogatives des héritiers sur l’identité numérique du défunt sont par ailleurs fortement limitées par la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés du 6 janvier 1978. Celle-ci ne prévoit pas la transmission des droits d’accès.
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